Chroniques d'humeurs

Les pharmaciennes sont à la santé ce que les coiffeuses sont au système capillaire, un florilège de petites phrases toute faites pour combler le vide.

Ne vous êtes-vous jamais retrouvé engoncé dans le fauteuil en simili cuir d'un salon de coiffure bondé? La coiffeuse se penche sur votre couvre-chef naturel et après en avoir inévitablement déploré l'état, tandis qu'elle se met à l'oeuvre, vous assène des banalités-fleuve allant du temps qu'il fait jusqu'à savoir comment se sont passé les fêtes ou encore quelle est la date de vos prochaines vacances.

Ça vous rappelle quelque chose, n'est-ce pas?

Je leur donne volontiers le change, bien que le brain-storming météorologique matinal ne soit clairement pas ma tasse de thé.

Autre lieu, la pharmacie.

Vous sortez de chez votre généraliste préféré pour la quatrième fois en deux mois avec une ordonnance bien chargée, vous poussez la porte de la pharmacie et le jeu commence. La pharmacienne jette un bref coup d'oeil à ladite ordonnance et se met au défi de deviner la pathologie qui vous étreint. Elle aurait pu être médecin ou chercheur ou les deux mais non elle est philanthrope, elle reste sagement derrière son comptoir à délivrer ses potions. Et comme si cela ne suffisait pas, notre chère amie, non contente de faire la pluie et le beau temps sur les diverses médications, fait la météo l'air de rien à propos des microbes qui nous harrassent:  "Il fait doux c'est dans l'air". Alors si c'est dans l'air, l'on n'y peut rien. Et la voilà partie, à commenter le fait que tout ce soleil en hiver n'augure vraiment rien de bon pour le printemps, et ne parlons pas de l'été.

Il ne lui aura fallu que quelques instants pour affirmer sa toute puissance sur les microbes aériens et vous flinguer le moral quant à vos chances de sortir vos habits d'été en avance.

C'est à croire qu'il est rassurant de remplir l'espace de banalités plutôt que de se taire.

Pourtant n'est-il pas constant que si la parole est d'argent, le silence est d'or?